"La bibliothèque des coeurs cabossés" de Katarina BIVALD (SE)

29. nov., 2016

« Un destin tracé par une amitié unie dans l’amour des livres »

Voilà un livre qui saura vous happer par ses couvertures alléchantes qui vous titillent à la seconde même où vous les tenez entre vos mains. « La bibliothèque des coeurs cabossés » est le premier ouvrage de Katarina BIVALD. Édité en 2013, il est arrivé chez nous en 2015, traduit du suédois par Carine Bruy.

Dans son roman, l’auteure, narratrice omnisciente, nous compte l’histoire d’une amitié qui va transformer le destin de Sara Linqvist. Suédoise de 28 ans, elle vit depuis toujours sous un dôme de littérature où les frontières de ses déplacements se dessinent dans l’imaginaire de ses livres. Tel « un bernard-l’ermite » protégé dans sa coquille, elle ne pratique quasiment pas d’échanges avec le monde extérieur en dehors de son travail. Néanmoins, depuis quelques années, elle correspond avec une vieille dame nommée Amy Harris. Leur amour pour la littérature va les rapprocher. Par des échanges de courriers, elles vont apprendre à se connaître, à s’aimer. Lorsque que Sara perd son emploi de bibliothécaire, elle y voit là un créneau propice à une rencontre. Alors qu’elle est en chemin, elle tente inlassablement de joindre son amie mais en vain. L’aurait-elle oubliée ? Abandonnée, là, au milieu de l’Iowa ? Impossible, elle ne peut se résoudre à le croire. Arrivant enfin sous le porche d’Amy, la porte s’ouvre mais ce n’est pas elle qui la reçoit. Le destin qui les a unies vient à jamais de les séparer, Amy est décédée depuis quelques jours.

« Ce n’est pas le chagrin qui accabla Sara mais la conscience aiguë du caractère transitoire de la vie, [...]. Elle avait fait le chemin de Suède jusqu’a l’Iowa pour marquer une pause dans sa vie, pour échapper à la vie même, mais certainement pas pour être confrontée à la mort. » - p. 14

Maintenant que son amie n’est plus là, que peut-elle bien faire dans cette ville d’une extravagante monotonie ? La mélancolie des lieux et la morosité des habitants sont telles que même sa propre vie est animée et joyeuse ! A l’inverse, pour les autochtones, c’est une aubaine. Une touriste chez eux fait attraction ! Hors de question qu’elle s’en aille. Le seul logement qu’on lui propose se révèle être celui de la défunte, funeste commencement. Mais un jour, ivre d’une soirée bien arrosée, elle franchit le seuil de l’unique pièce qu’elle a laissée close depuis son arrivée, la chambre à coucher d’Amy.

« Sara se laissa tomber sur le grand lit qui trônait au milieu de la pièce et regarda autour d’elle avec émerveillement. » - p. 79

« Cette nuit-là, elle resta dans la bibliothèque d’Amy en méditant le fait tragique que les écrits sont immortels alors que l’homme ne l’est pas, et elle pleura la mémoire de cette femme qu’elle n’avait jamais rencontrée. » - p. 81

Durant les semaines qui suivent, Sara fait la chose la plus étonnante qui soit en mémoire de son amie. Cet événement va bouleverser toute sa vie et la minuscule communauté de Broken Wheel n’aura plus jamais le même visage.

Dans son oeuvre, l’auteure met en avant – entre autres –  l’amitié et ses étapes, le regard qu’on porte sur la vie et l’impact de l’écriture dans celle-ci. En nous projetant à la place de la protagoniste, on peut se demander si nous aurions agi de la même manière et quelle importance nous accordons au dévouement dans l’amitié. Sommes-nous prêts à tout ?

Quant aux livres, la grande question que tout lecteur s’est posée un jour : « Que représentent-ils pour moi ? ». Êtes-vous « une Sara » ou « une Amy » ? Peut-être n’y l’une, n’y l’autre. Mais l’essentiel n’est-il pas de le savoir ? N’avez-vous jamais remarqué que, très souvent, ce sont eux qui racontent notre histoire ?

Quoi qu’il en soit, vous trouverez dans ce roman, la recette habituelle « aventure-drame-amour ». L’histoire décrite est réaliste et dispose d’un niveau de langue correcte, adapté au contexte avec des dialogues bien tournés. Sous forme d’alternance, l’auteure nous poste avec parcimonie et chronologie les missives d’Amy. Évoquant ainsi les échanges passés, elle nous donne l’occasion de la connaître et de l’apprécier à notre tour.

Malheureusement, l’enchantement est de courte durée. L’histoire démarre dans les cents premières pages avec vivacité et force se voulant passionnante, pour basculer sur un rythme ennuyeux avec des descriptifs redondants et lassants par manque de réels rebondissements. Un climat qui a mis à rude épreuve mon endurance à la terminer. Il aurait été intéressant d'y rajouter de l’intrigue plus captivante au cours de l’histoire, afin de la faire osciller avec force, lui redonnant ainsi un nouveau souffle. Un résultat qui aurait fait de ce récit original, sympathique, touchant et un brin cocasse, une œuvre dynamique et variée.

L'auteure

Née en 1983, Katarina Bivald a grandi en travaillant à mi-temps dans une librairie. Aujourd’hui, elle vit près de Stockholm, en Suède, avec sa sœur.

Extrait du livre, lu par Kelly Marot via https://youtu.be/dPMW8DM8x0g

Son deuxième livre, "Le Jour où Anita envoya tout balader" est paru le 11 mai 2016 aux éditions Denoël, traduit du Suédois par Marianne Ségol-Samoy. 

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"Le Parc" de Olivier CHAPUIS (CH)

20. nov., 2016

Sa forme singulière en fait son originalité !

L’agent de police Baumann, Le fraudeur Loïc Menetrey, Sa petite amie Sabrina, Le jeune Sam, Son père Michel Auberson, il n’y en a pas un qui soit moins important que l’autre. Chacun a, d’une certaine manière, joué un « rôle » indirectement ou non, dans les dernières heures de la vie de Cédric Vallotton.

Attaché commercial, écolo à ses heures perdues, admiré par son épouse et père de trois enfants, il n’est pas moins à l’effigie de l’homme parfait...ou presque. Un matin, alors qu’un rendez-vous clientèle l’attend en ville de Lausanne, il préfère partir à pied que de prendre sa voiture. Une sonnerie retentit, un retard de rendez-vous, un vide de temps à combler, tout cela comme une réponse donnée, à un besoin révélé quelques minutes plus tôt.

« [...] il regarda sa montre. Il avait rendez-vous cinq minutes plus tard. Pour la première fois depuis longtemps, depuis le début de sa vie professionnelle sans doute, il n’avait pas envie de se rendre chez son client. Il aurait aimé s’asseoir dans un bistrot, commander une bière et la savourer gorgée par gorgée, lentement, comme s’il s’agissait de la dernière. » - p. 20

Longeant la zone nord du parc de Mon Repos, Cédric va se trouver devant un choix. Entrer dans l’antre d’un artiste peintre ou continuer sa quête, pour s’arrêter au premier bar venu, afin de « s’abrutir » une fois de plus devant « les pages bâclées d’un quotidien gratuit ». Pour une fois ses habitudes n’ont pas cours, il fait volte-face, traverse la rue et frappa à la tanière de l’agité du pinceau, l’ancienne orangerie.

Est-ce que Cédric aurait pris cette décision s’il avait su ce qui allait se produire ? Est-ce-que cela aurait changé quelque chose s’il avait gardé ses habitudes ? Destinée ou concours de circonstances ? Jamais personne ne le saura, mais Gayle Forman, auteure et journaliste américaine a dit : « Dans la vie il faut parfois faire des choix, et parfois ce sont les choix qui te font. »

A sa sortie, Cédric reprend le chemin du Parc. Cet endroit aux effluves romantiques, témoins des premiers émois pour sa femme. Cet endroit où aujourd'hui, pour une raison qu’il ignore, un souvenir d’antan vient le hanter, comme un couperet prêt à fendre.

« C’est alors qu’ils entendirent clairement un coup de feu claquer dans l’air, à moins de cent mètres, un coup de feu qui figea les trois hommes et le couple de géants dans une posture de statues de sel, tandis qu’entre les arbres s’envolaient quelques oiseaux affolés. » - p. 40

Dans ce roman, l’auteur n’a de cesse de tenir son premier rôle, celui de narrateur. Au fil des chapitres, acte après acte, il déroule les événements sous forme d’analepses, modifiant uniquement l’angle de vision. Comme un puzzle, chacun des récits apporte un élément supplémentaire à l’histoire principale. Maîtrisant parfaitement son sujet, il ressert les étaux, tour après tour, réduisant ainsi la distance qui nous sépare de l’intrigue. Il nous entraîne où il veut, nous manipulant telle un fantoche dans les mains de son marionnettiste.

Mais cet écart « imposé » au lecteur par un schéma narratif et un style original est aussi le talon d’achille de l’oeuvre. A tort ou à raison, j’attends des séries noires qu'elles me fassent ressentir tout un ensemble d’émotions. La curiosité, la suspicion, l’inquiétude, l’angoisse, la colère, le dégoût, le suspense et cetera. Malheureusement, ça n’a pas été le cas. Il me manque cette relation plus approfondie avec le personnage principal afin d’éviter un sentiment corrélatif à un fait divers. A regrets, je ne peux qu’aimer moyennement ce roman, préférant de surcroît « Nage Libre » paru cette année aux éditions Encre Fraîche.

L’auteur

Né au siècle passé, un dimanche de Pâques, Olivier Chapuis triture et malaxe les mots pour en extraire un jus qu’il espère goûteux. Le désir d’écrire, il l’éprouve enfant déjà, lorsqu’il se met à écrire d’absurdes histoires de planètes inconnues peuplées d’êtres hybrides forcément hargneux. Plus tard, il se contente de la terre et de ses habitants, souvent hybrides et parfois hargneux, mais source intarissable d’inspiration.

Bibliographie

Fragments, recueil de nouvelles version papier, Les Éditions de Londres, 2016

Nage Libre, roman, Encre Fraîche, 2016

Le Parc, roman, BSN Press, 2015.

Insoumission, roman numérique, Les Éditions de Londres, 2015.

Fragments, recueil de nouvelles numérique, Les Éditions de Londres, 2013.

Extrait audio sur Youtube « Au Naturel » - de « Fragments » : Vidéothèque

copyright : M.F. Schorro

"Mer d’érables" de Anne CAMPICHE-PANCHAUD (CH)

8. nov., 2016

On connait la crise d'adolescence ou la crise de la quarantaine, mais voilà la crise des retraités, ils divorcent !

Le cap de la retraite n’est pas un mythe. Retrouver ses repères, s’agender un nouveau quotidien alors que le dernier, d’un rythme métronomique, a été balayé du jour au lendemain. Tout cela peut se révéler déroutant ! Mais que se passe-t-il si vous découvrez que le « fil-de-fer » de votre relation conjugale parfaitement équilibré, tendu et positionné avec une précision millimétrique depuis des décennies, vient d’atteindre son point de rupture dans une société où le divorce n’est plus tabou ?

Daniel Desbiens, écrivain québécois a dit : « Le Glas de la liberté hélas sonne pour celui qui jamais ne se passionne ou ne s’abandonne. » Cela va pour notre société actuelle, mais jadis, était-il possible d'imaginer vivre avec passion ou ses passions ?

Un papier, un mot sur un coussin, et la destinée de Lou va radicalement changer. 

Un papier, un mot sur un coussin, et c’est la vie de toute une famille qui se voit bouleversée.

Un papier, un mot sur un coussin, aura suffi à Jean pour interrompre définitivement leur prestation de « fil-de-fériste » débutée autrefois.

Voilà un fragment de la lettre de Lou, écrite à son cher mari, en réponse à son « torchon quadrillé, noirci de quelques mots griffonnés » qu’il lui a laissé en guise de rupture.

« [...] Le glas de la retraite ne te tomba pas dessus par surprise. Souvent tu me parlais de ce moment de ta vie où tu pourrais enfin faire ce qui te chante. Tu n’as pas réalisé, je crois, ce que cela impliquerait au niveau de notre couple, ou plutôt si ! Pour toi tout continuerait comme par le passé, avec l’épouse à l’intendance et toi enfin délivré de tes horaires et de tes obligations professionnelles. Tu n’attendais plus que ce moment, parcourir le monde, le corps bardé de tes appareils de photo, traquant le moindre monument, la moindre brindille se balançant au vent. Tu as juste oublié qu’il y aurait une vie entre tes mouvances exploratrices et que cette vie-là se déroulerait à mes côtés, dans un espace qui avait été le mien pendant de nombreuses années. » - p. 101

Cette missive est splendide, libérée, loyale et piquante à souhait ! J’adore !

« Si nous n’avions pas été frappés par la foudre d’Eros, nous aurions très vite compris que nous étions aussi fait l’un pour l'autre qu’un lamantin et une gazelle » - p. 100

Je regrette que cela soit l’unique partie que j’ai appréciée. N'étant pas touchée de près comme de loin par le divorce des retraités, j'ai trouvé que l’histoire manquait d'originalité, la rendant lassante et ordinaire. Est-ce parce que le divorce est devenu banalisé, faisant partie intégrante de l’actualité d’une société à la dérive ? On peut se poser la question. Malgré tout, un couple qui se sépare, monsieur reprend sa liberté illusoire, les enfants crient au scandale et les petits-enfants souffrent. L’anarchie méli-mélo dramatique habituelle, suivie d’un syndrome post-traumatique qu’il va falloir surmonter parce que la vie continue. Seule « originalité » c’est la génération de nos aînés qui est concernée, de « nos vieux », et les dommages collatéraux sur les générations suivantes se révèlent à d'autres niveaux.

L'auteure a choisi de raconter l'histoire à travers la personne de Lou. Elle mélange les styles affectif, logique et périodique et tend à suivre un schéma actanciel en disposant d’un vocabulaire accessible à tous. Je soupçonne qu'elle a cherché, en tant que thérapeute de formation, à nous mener sur un chemin de réflexion personnelle. Nous offrant ainsi d’utiliser l’uchronie à travers divers problèmes soulevés tels que l’oubli de soi, la tromperie, les étapes de la vie, le rôle de chacun et cetera, afin de mettre en miroir les strates de notre personnalité et d’y trouver "la solution idoine".

Comme on peut l'imaginer, il y a matière à réflexion ; pour autant que notre vécu ou notre intérêt personnel permette une mise en relation avec, ce qui n'est pas mon cas. Voilà pourquoi je pense que la force de ce roman réside purement dans son genre psychologie et réflexion de soi. Dépouillez-le de cela et l'histoire devient malheureusement banale.

L’auteure

Anne Campiche Panchaud est née à Yverdon en 1943. Elle poursuit ses études commerciales à Lausanne et travaille au sein de quelques maisons d'édition avant d'ouvrir son cabinet de thérapeute en 1987.

Plus d’informations via 

www.annecampiche.com

http://www.rts.ch/play/tv/12h45/video/societe-anne-campiche-panchaud-auteur-de-mer-derables-sinteresse-aux-divorces-chez-les-retraites?id=5646948

http://www.franceloisirs.ch/blog/salon-du-livre-geneve/anne-campiche-panchaud-romanciere/

 

"Un Juif pour l'exemple" de Jacques CHESSEX (CH)

28. oct., 2016

Qu’il est exaltant de voir les mots se lier les uns aux autres si aisément !

Jacques Chessex a démontré depuis des décennies son talent d’auteur hors pair. Poète, écrivain et peintre, je le lis pour la première fois à travers cette œuvre.

Le roman se déroule à Payerne (CH). En 1939, alors que la deuxième guerre mondiale est déclarée, plusieurs centaines de chômeurs sont mobilisés pour renforcer l’armée fédérale. Les ressources de la ville diminuent, des petits commerces et des banques sont obligés de fermer. La colère des habitants gronde dans les rues. Mécontents de cette économie qui chute, les autochtones commencent à palabrer sur ces juifs locaux à qui profite cette nouvelle économie. Cette situation, l’antithèse de celle qui se vit dans le reste de l’Europe, nourrit la haine des esprits hitlériens qui cherchent à établir à Payerne, « les premières marches du règne helvétique nazi».

C’est alors qu’en avril 1942, le pasteur Philippe Lugrin, homme respecté de sa communauté, va sciemment profiter de la confiance du peuple pour déployer propagande persuasive et excitation des rancœurs afin de nourrir son antisémitisme, reflet de la putréfaction de son âme. Cet « obsédé théologien antisémite » va faire la rencontre de Fernand Ischi et de sa troupe. Jeune homme de 16 ans, ivre d’orgueil, manipulable à souhait et fasciné par l’Allemagne et la prise de pouvoir d’Hitler.

L’interaction de ces deux acolytes, « un théologien dévoyé et son apprentis Gauleiter », va engendrer un plan macabre. Le titre du livre nous en dit long : Un juif pour l’exemple.

« [...] qu’ils sachent ce qui leurs pend au nez. [...] L'ordre de mort est accompli. Le règne vient. Heil Hitler ! [...] »

On ne dénombre plus la quantité d’histoires qui ont été racontées sur le massacre des juifs. Mais chacune d’entre elles à une valeur propre et vous touche immanquablement.

L’auteur débute la narration, comptée comme un souvenir d’antan, en se tenant à équidistance, nous permettant ainsi d’être bon public en nous offrant, une fois de plus, une lecture délectable. Puis, d’une manière évidente, cette distance se réduit, jusqu’à devenir inexistante. Jacques Chessex devient la voix narrative, une transition parfaite qui donne à cette histoire une nouvelle force, une intimité confessionnelle.

« Je n’attendais rien de la rencontre, le hasard seul m’a mis en présence de ce fou. Je prends place à une autre table sans détacher mes yeux du personnage qui commence à agir en moi comme un aimant malfaisant. Et tout à coup je le sais : il y a une perversion absolue, salement pure, incandescente sur ses ruines, qui relève de la damnation. L’homme abominablement verrouillé qui poursuit son rêve absurde à deux pas de moi ne dépend plus d’aucune instance humaine, il dépend de Dieu.  [...] J’ai vu Lugrin, c’est un spectacle qui salit, [...] »

Ce passage est un coup de cœur. Chaque mot utilisé l’est à bon escient. Il est puissant, vrai, juste. On y voit la folie pure, le mal imprescriptible qu’aucune condamnation humaine ou ordalie ne pourra affranchir. Le seul jugement possible et impartial se révèle être entre les mains de Dieu. 

 

L'auteur

Jacques Chessex est né le 1er mars 1934 à Payerne. Poète, écrivain et professeur de français et de littérature au Gymnase de la Cité à Lausanne, il écrit dès son plus jeune âge de la poésie et publie en 1954 son premier recueil Le Jour proche.

En 1956, à la suite du suicide de son père, son œuvre tirera alors l’essentiel de sa dramaturgie et de sa thématique d’un scénario existentiel marqué par cet événement tragique. En 1973, il obtiendra le prix Goncourt pour son roman L'Orge et occupera, dès lors, une position majeur dans la littérature romande.

Le 9 octobre 2009, il décédera des suites d'un malaise cardiaque à la bibliothèque publique d'Yverdon-les-Bains alors qu'il participe à une conférence au sujet de l'adaptation théâtrale de son roman la Confession du pasteur Burg.

Jacques Chessex est le seul écrivain suisse ayant reçu le prix Goncourt, mais également le prix Goncourt de la poésie en 2004.

Plus d'informations via

https://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Chessex

http://www.hommages.ch/defunt/47701/jacques_chessex

http://www.ina.fr/video/3813836001

 

"Permis C" de Joseph INCARDONA (CH-ITA)

18. oct., 2016

Voilà un roman qui vous permettra de découvrir Joseph Incardona sous une autre facette littéraire que ses séries noires habituelles. Mélangeant les genres autobiographique et fiction, il nous entraîne dans l’année 1978 où la diaspora Italienne en Suisse vivait ses derniers moment. 

Il y relate les difficultés que subissent les immigrants pour s’établir dans un pays trouver du travail, être acceptés par la communauté. Les dommages collatéraux sur l’harmonie familiale, la scolarité des enfants, la violence raciale transforment leur vie en survie constante dans un milieu parfois hostile et indomptable. 

L’histoire est celle d’un jeune Italo-Suisse, André Pastrela, alter ego de l’auteur. Fils d’un immigrant sicilien et d’une mère suisse, il n’a alors que 12 ans. Son père ayant perdu à nouveau son emploi, la famille doit derechef ! déménager, pour la Xème fois. 

Alors que ses parents tentent de maintenir un certain équilibre dans une instabilité quotidienne, pour André, partir c’est synonyme de tout recommencerNouvelle école, nouveaux copains, nouvelles bagarres, insultes, et cetera. Un circuit fermé, gaspilleur perpétuel d’énergie dans l’espoir de s’intégrerToutefois, cette année a du bon. Lcoupe du monde en Argentine permet l’effervescence dans les quartiers pour les fans de football. Les débordements entraînés par les mœurs sportives donnent l’occasion à ses parents de faire de nouvelles rencontres, de passer du temps en famille afin de sauver ce qu’il peut encore l’être. 

La coupure annuelle des vacances scolaires offre un moment de répit, un retour au pays pour se ressourcer, lieu de paix et d’expériences coquines pour notre jeune protagoniste. Il n’en reste pas moins que le passé ne se laisse pas oublier si facilement. A son retour, la dégringolade. Déchiré à la maison, déchiré dans la cité, pour André, être rital et bâtard à la fois est un poids dont il se délesterait sans contestations. Mais la réalité ne lui en offrira pas l’occasion, au contraire, cette année semble de mauvais augure et marquera au fer rouge sa vie de jeune adulte. 

« C’était l’heure de rentrer à la maison (l’heure de qui ? Pour quoi faire ? Où était ma mère, où était mon père, bordel ?). On a rangé nos affaires dans le sac de sport d’Etienne. On a décidé de revenir en patinant au lieu de marcher comme on le faisait d’habitude. La nuit était tombée, les enseignes au centre commercial fauchaient de rouge et d’or les zones d’ombres des terrains en friche. ... Tout en patinant, j’inspectais les environs, je me demandais où était la bande, ... » 

J’ai choisi de citer ce passage car il démontre sans équivoque l’issue de l’errance d’un adolescent livré à lui-même par l’absence d’un entourage familialed’une scolarité difficile et par l’obligation d’être aux aguets sans discontinuer, près à rendre œil pour œil et dent pour dent à qui viendra se frotter à lui.  

Alors que l’auteur traite dans son nouveau roman de sujets actuels, intéressants et qui me touchent particulièrement, l’attrait que je leur porte contraste avec l'absence de plaisir que j’ai eu en le lisant. Je trouve le style narratif peu entraînant, rendant l’histoire creuse et ordinaire pour des sujets aussi capitaux. Peut-être qu’Incardona me surprendra plus dans son roman « Derrières les panneaux il y a des hommes » sorti en 2015, mais en attendant, jmaintiens mes préférences fidèles à la noirceur de sa plume.

L'auteur
 siècle. Malgré la gravité des thèmes qu'il a pour habitude de traiter avec le style très noir et rythmé qui le caractérise, on trouve aussi dans ses œuvres un ton décalé souvent associé à une forme de pudeur.
 En 2015
, son roman 
Derrière les panneaux il y a des hommes
, publié aux Editions Finitude,
De mère suisse et de père sicilien, Joseph Incardona est l'auteur d'une douzaine de livres, de scénarios (pour le théâtre, le cinéma et la bande dessinée), ainsi que réalisateur de cinéma. Personnalité atypique et auteur prolifique, ses références sont issues à la fois de cette culture mixte suisse et italienne, ainsi que du roman noir et de la littérature américaine du 
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xx
remporte le Grand prix de littérature policière
 du meilleur roman en français.

Plus d'informations via http://www.josephincardona.com